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Qui sont les Étrusques ?

Langues italiques au VIe siècle av. J.-C.

Langues de l'Italie au VIe siècle av. J.-C., Dbachmann (créateur) Ewan ar born (contributeur), CC BY-SA 3.0

Avant que Rome ne domine toute l’Italie, celle-ci était occupée par une myriade de peuples dits italiques : Osques, Samnites, Sabins, Falisques, ou encore Latins par exemple. Parmi eux, les Étrusques comptaient indubitablement comme l’une des puissances les plus importantes de la péninsule italique. En témoigne l’historien romain Tite-Live, qui écrivit au Ier siècle avant notre ère que « Grande était la puissance de l'Étrurie, dont la glorieuse renommée envahissait les terres et la mer aussi sur toute l'étendue de l'Italie, des Alpes au détroit de Sicile. ». (Tite-Live, Histoire de Rome depuis sa fondation, I, 2-5, Traduction nouvelle de Danielle De Clercq, Bruxelles, 2001).

Présents aussi bien dans la plaine du Pô qu’en Campanie, sur la côte Tyrrhénienne (dont le nom signifie par ailleurs « étrusque » en grec) que la côte Adriatique, les Étrusques se sont principalement implantés entre l’Arno et le Tibre, en Toscane, Ombrie et Latium actuels. Ce territoire fertile et riche en minerai (fer, cuivre, plomb, argent) est exploité dès le tournant de l’âge du Bronze et de l’âge du Fer, expliquant le développement rapide de la région (Briquel 2018, pp.6-12).

Un peuple aux origines encore incertaines

Dès l’Antiquité la question des origines des Étrusques suscite le débat (Pallottino 1975, pp.65-81 ; Briquel 2018, pp.21-26).

Au Ve siècle avant notre ère, Hérodote leur donne une origine orientale, les Étrusques étant selon lui un peuple ayant émigré de Lydie (Hérodote, Enquête, I, 94). À la même époque, Hellanicos de Lesbos les fait s’apparenter aux Pélasges, peuple égéen qui aurait également migré vers l’Italie (Hellanicos cité par Denys d’Halicarnasse, Antiquités romaines, I, 28). Face à ces hypothèses migratoires, Denys d’Halicarnasse propose au tournant de notre ère une théorie autochtone, les Étrusques étant selon lui originaires d’Italie (Denys d'Halicarnasse, Antiquités romaines, I, 26-30). Au XVIIIe siècle Nicolas Fréret les rapproche quant à lui aux Rhètes alpins (Fréret, Recherches sur l’origine et l’ancienne histoire des différents peuples de l’Italie, 1753).

Si de nos jours la question n’est pas encore totalement tranchée, elle n’est plus au cœur des débats actuels en recherche.

Au-delà des interrogations portant sur leurs origines, les chercheurs s’accordent à dire que les Étrusques se sont développés à partir des cultures dites proto-villanovienne (1200-900 av. J.-C.) et villanovienne (900-720 av. J.-C.), nommées ainsi en référence au site de Villanova, découvert en 1853 près de Bologne par Giovanni Gozzadini (Bartoloni 2013, p.79).

Urnes biconiques villanoviennes au musée national étrusque de la Villa Giulia (Rome)

Kyathos à pied en bucchero

Kyathos à pied en bucchero, 575-550 av. J.-C., n°16.174.11, New York, Metropolitan Museum of Art

La culture étrusque à proprement parler émerge à la période orientalisante (730-580 av. J.-C.), nommée ainsi en référence aux influences orientales dans l’art grec de l’époque. Cette période voit le développement des contacts entre Étrusques et Grecs avec la fondation au VIIIe siècle des colonies eubéennes de Pythécusses et Cumes dans le sud de l'Italie (Massa-Pairault, s.d.).

Ces interactions stimulent l'artisanat local en introduisant de nouveaux motifs et techniques, à l'instar de la céramique tournée à pâte claire et dépurée. En plus d’une production locale étrusco-corinthienne, les Étrusques mettent au point au VIIe s. avant J.-C. une céramique entièrement noire typique de l’Étrurie : la céramique de bucchero (Massa-Pairault, s.d.).

C’est également à cette période qu’est introduite l’écriture en Étrurie. Si les Étrusques empruntent l’alphabet grec des Eubéens, leur langue reste toutefois encore méconnue de nos jours (Massa-Pairault, s.d.).

Enfin, les Étrusques ne restent pas cantonnés à leurs terres et instaurent dès le VIIIe siècle une puissante et prospère thalassocratie, à la fois pirate et marchande (Briquel 1999, pp.83-104).

Divinités et croyances

Les Étrusques empruntent aux Grecs une partie de leur panthéon, non sans se l’approprier. Les divinités peuvent voir leur nom et leur culte changer. Le héros Héraclès devient par exemple Hercle, dieu important du panthéon étrusque associé à la pratique oraculaire (Simon 2006, p. 58). Des divinités purement étrusques existent également, à l’instar de Vanth, démone liée à la mort et au monde souterrain (Simon 2006, p.61).

Les Étrusques sont réputés chez les Romains pour leurs rites et leur religion, l’Etrusca Disciplina. A l'inverse de la religion grecque ou romaine, celle-ci s'appuie sur des livres sacrés réputés avoir été écrits pour certains par deux prophètes, Tagès et Vegoia. Ces livres traitent notamment de la divination par l'étude du foie des animaux sacrifiés (l’haruspicine), ou encore des rites de fondation d'une ville (Briquel 2018, pp.83-90).

La Ligue étrusque au sein de l’Étrurie en 750 av. J.-C.

La Ligue étrusque au sein de l’Étrurie en 750 av. J.-C., Arthur Laisis (créateur), Flappiefh (contributeur), CC BY-SA 3.0

Les Étrusques continuent de prospérer au VIe siècle comme en témoigne la Ligue étrusque, fédération moins politique que religieuse d’une douzaine de cités qui se réunissait annuellement au fanum Voltumnae, sanctuaire dédié à Voltumna, près de Volsinies (actuelle Orvieto) pour l’organisation de jeux et foires (Massa-Pairault 2016, p.108).

La création de comptoirs sur la côte (les Emporia) favorise quant à elle les échanges commerciaux avec le reste de la Méditerranée (Briquel 1999, p.123). Les Étrusques importent ainsi des vases par milliers, principalement de provenance attique (de la région d’Athènes, retrouvés tout particulièrement à Vulci).

Bronziers et coroplathes (artisans travaillant l’argile) font quant à eux la renommée de l’artisanat étrusque de l’époque (Massa-Pairault s.d.).

Un chef-d'oeuvre étrusque : La Chimère d'Arezzo, env. 400 av. J.-C., bronze, Florence, Musée archéologique

Modèle 3D par Matthew Brennan.

Après avoir vu l’effondrement de son commerce et hégémonie maritime au Ve siècle, l’Étrurie disparaît au cours de la conquête romaine. Celle-ci se réalise au travers de guerres successives du IVe au IIIe siècle avant notre ère, et voit peu à peu la soumission de toutes les cités étrusques (Scullard 1967, pp.267-276).

Des traces de la culture étrusque survirèrent cependant au travers de Rome, cette dernière lui empruntant par exemple les rites propres à la fondation d’une ville, ou bien la pratique de l’haruspicine (Briquel 1999, pp.233-239).

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